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Henry War
18 janvier 2019

Souvenirs sur Friedrich Nietzsche, Franz Overbeck, 1908

Souvenirs sur Nietzsche Overbeck Jamais, je crois, un livre sur un auteur n’aura aussi peu appris sur cet auteur que le livre d’Overbeck sur Friedrich Nietzsche. C’est à peine si cet ouvrage n’est pas purement mensonger tant il contient peu de souvenirs à proprement parler : vraiment, Overbeck semble passer plus de temps à tâcher de persuader qu’il fut un ami du philosophe qu’à montrer qu’il est capable de parler de lui en connaissance de cause ! Et ceci ne présume rien du grand savoir que j’aurais de Nietzsche : j’ignore presque tout de lui en particulier à défaut de son œuvre, et ce n’est certes pas que je m’attendais à des renseignements très pointus, non, juste de quoi alimenter à titre d’information la peinture d’un caractère, voilà ce que j’escomptais.

Mais Overbeck n’est pas pénétrant, oh non ! c’est tout le drame de ce petit homme un peu idolâtre. Au mieux, il a produit un livre de compliments au milieu duquel il tient le rôle falot de caudataire extrêmement humble (lire l’extrait ci-joint, presque sidérant de tournures lâches et ampoulées, d’ellipses molles et intraduisibles et de contradictions insolubles : on croirait presque, à lire cela, que l’ami Overbeck… détestait son ami ! Je vous mets au défi d’y apprendre la moindre information en tant de mots inutiles !) : c’est aberrant qu’un individu comme Overbeck ait seulement pu être supporté par un autre comme Nietzsche. Son discours servile est mal conçu, même thématiquement : on veut nous apprendre d’abord ce que n’est pas la philosophie du penseur (ce en quoi je ne suis même pas toujours d’accord), puis on tient à nous indiquer avec moult démonstrations quels hommes Nietzsche fréquentait physiquement ou intellectuellement (on s’en fiche bien à mon avis !), et enfin tout le génie d’Overbeck tient à l’assurance apparemment paradoxale que Nietzsche n’a pas toujours été fou et qu’il écrivait en pleine possession de ses facultés au temps de ses publications (sensationnel !). Mais quant à savoir qui était Nietzsche, quelle sorte de compagnon, de quelle façon il exprimait ses amitiés et ses transports, comment il discourait ailleurs que dans ses livres : ne rien espérer sur ces matières ! On découvre à la fin un peu par voyeurisme le soudain effondrement mental du philosophe, encore que tardivement et avec fort peu d’éléments probants d’observations diagnostiques, et pire : cette hypothèse absurde et comme déloyale qu’une démence peut provenir d’une tendance excessive à… l’introspection !

Il paraît qu’Overbeck fut l’auteur d’essais remarquables, ce dont je doute fort eu égard à sa prose bâtie de minauderies et à son talent minable d’observateur humain ; pour autant, je crois qu’il eût été pire pour moi, quelle que soit mon époque, que de me forcer à consulter ses publications : et c’est de devoir côtoyer comme « ami » un pareil fantôme d’homme !

 

À suivre : Souvenirs sur Friedrich Nietzsche, Deussen.

 

***

 

« Cette amitié, en vertu des conditions auxquelles elle était soumise en nous, ne s’est d’ailleurs avérée facile pour aucun de nous deux, alors même qu’elle s’était imposée très tôt à tous les deux et perdura pendant de nombreuses années, pour ne s’éteindre que sous la contrainte des circonstances. En ce qui concerne cette genèse, laborieuse à bien des égards, je sais évidemment ce qu’il m’a fallu « dépasser » dans l’attitude générale de Nietzsche, mais je sais aussi avec quelle fascination j’y suis toujours parvenu ; ainsi j’éprouvais presque toujours de façon quasi simultanée ce contraste blessant et l’attirance la plus profonde qui soit ; et les moments où s’imposait cette sensation aliénante de contraste furent chez moi si furtifs que l’amitié s’affirma comme le continuo de notre relation. Il faut dire qu’il ne m’arriva qu’à une seule reprise « d’élever » la voix contre Nietzsche et de lui témoigner mon mécontentement. Du reste, ici, où le paradoxe m’importe peu, je ne fais que rendre compte de mon expérience de la manière la plus simple en disant que notre amitié ne connut jamais d’ombre, quelles qu’aient pu être les entraves qu’elle rencontra. » (page 89)

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