Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Henry War
9 septembre 2021

Fin de récit pour l'Histoire

Si, comme je le pense, l’histoire n’est pour l’essentiel qu’une collection de mythes, de bouffissures, de déformations complaisantes et d’amplifications chauvines – en quoi selon moi un véritable historien, un historien objectiviste, devrait d’abord être celui qui soupçonne et qui doute – , alors, puisque de nos jours elle se dispense aisément de recherches au regard de la multiplicité concordante des vidéos établissant les faits incontestables de toutes parts, l’histoire est morte, car elle n’a plus de légende à fabriquer en répétitions obstinées et partisanes insinuées par persuasions et par croyances, répétitions progressivement majoritaires, sociales et morales, qui constituent, chez le contemporain, la forme reconnaissable et la définition même du fait réel en tant que pensée circonstancielle intériorisée comme vraie. Le fait n’est pour lui rien de plus, et l’intériorisation passe surtout par des autorités, avec ou sans argument – l’histoire comme discipline n’a presque jamais eu le caractère positif d’une science. Pour l’exprimer en une autre formule aussi exacte que dure, dès qu’il n’est plus possible de mentir, l’histoire, en tant qu’étude sérieuse et non interprétative, s’arrête, son pouvoir s’éteint, plus personne ne s’y intéresse, elle ne rencontre plus nulle part des gens qui la considèrent. Car quoi qu’elle prétende, elle n’a que rarement pour mission l’extraction scrupuleuse de faits passés ; manifestement, cette prétention ne se retrouve que chez une faible poignée d’historiens que notre époque déconcentrée et sans labeur ni mérite ne peut que négliger ; les autres continuent de se targuer, bien sûr, de la fidélité aux faits et de studieux scrupules comme cautions de bonne volonté et serments d’Hippocrate, mais la plupart ignorent même qu’ils s’illusionnent, n’ayant pas la moindre idée théorique des facteurs susceptibles d’influencer la perception de la réalité et donc de modifier la réalité elle-même qui en dépend, n’en tenant en tous cas aucun compte dans leurs synthèses, et n’éprouvant surtout pas le plus petit désir de l’apprendre ; et c’est ainsi sans se douter de ces trahisons de la vérité qu’ils vont compiler toutes sortes de documents, perdre leur temps à chercher loin papiers et décors, et ressortent extrêmement fiers quand ils en ont trouvé d’inédits même s’ils risquent d’être d’autant mensongers qu’ils sont inédits : ils appellent cela tous leurs apport et spécialité, matérialisés en découvertes de plus en plus douteuses, controuvées et invérifiables, suppositions étayées par nulle disposition pour l’anthropologie ni pour la maîtrise des règles intimes du matériau humain sur quoi ils prétendent si longtemps disserter, tant de dissertations, d’ailleurs, qu’ils ne rendent le plus souvent que par opportunisme ou routine de carrière, quand ce n’est pas, pire encore, par « passion », cette passion qui brise ou déforme dès l’abord tout accès à la vérité – Arendt particulièrement a travaillé ainsi dans de grandes faussetés bâties de paraître et d’engouement. Il n’y a, pour se convaincre d’un si large phénomène, qu’à constater comme les historiens se sont longtemps passés et continuent largement de se dispenser de philologie et de psychologie, tandis qu’ils poursuivent la réalité principalement à partir de textes et témoignages, comme si relation et réception d’un fait s’exonéraient des sciences primordiales relatives à la phénoménologie, ou, pour le dire sans user de ce terme un peu savant, comme si un rapport était suffisant et probant sans qu’il soit besoin de déterminer avec quel esprit et dans quelle intention, publique ou privée, il a été produit et transmis. Si rien que la seconde Guerre mondiale fut, dans les comptes rendus des généraux français en 1940, un presque-succès et une victoire prochaine, si de Gaulle proféra bien des contre-vérités, pour ne pas dire des mensonges éhontés, sur le rôle « héroïque » de la Résistance au terme du conflit (contrevérités dont il constitua les documents corroborants et donc ce qu’on appelle à présent des « preuves » de faits devenus historiques, par exemple en validant quantité de demandes d’attestation de service dans les FFI), si plus de cinquante ans après cette guerre on interdit, sous peine d’emprisonnement, jusqu’à la possibilité d’en nier certaines circonstances parce qu’elles furent consignées dans des documents officiels qu’on estima qu’il serait indécent de discuter (c’est un autre trait indiquant nettement le manque de caractère scientifique de l’histoire), comment entreprendre dorénavant une étude sérieuse, méthodique et parfaitement rationnelle du passé considéré comme le plus objectif possible, en négligeant tant de déclarations solennelles et de documents que l’histoire depuis ses débuts qualifie d’essentiels et d’indispensables, et en ne prétendant s’appesantir plus que sur le vrai, et en doutant raisonnablement même des documents et témoignages ? Au même titre, on produisit des mensonges involontaires pour discréditer tel Juif particulier en inventant contre lui des méfaits ou bien pour accabler Rudolf Höss, commandant du camp d’Auschwitz, en signalant à Nuremberg des crimes et turpitudes supplémentaires qu’en toute vraisemblance il ne pouvait avoir commis : ces mensonges sont semblablement consignés, servant l’historien, et ils revêtent un similaire caractère d’authenticité, ils sont devenus des faits parce qu’on ne s’est pas assez penché sur toutes les raisons qui les ont fait produire. Et voilà l’indéniable : la vérité passée n’est plus accessible à nos petits esprits contemporains, elle est à jamais ensevelie sous des tombereaux de désirs et de volontés qui se sont substitués aux faits et même qui se sont changés en faits : ce qu’il faut enfin entendre, c’est que la vérité a subi tant d’altérations opportunistes qui se sont figées en mœurs, en sentiments souterrains du juste, en impressions d’une histoire, en identités des personnes, des peuples et des civilisations à qui on l’a racontée et qui en restèrent imprégnées et fort persuadées, que c’est en toutes bonnes foi et conscience qu’un témoin, à l’écrit autant qu’à l’oral, après comme au moment même où il la vit, l’adultère et la trahit en la rapportant, car la vérité de ce qu’il voit est déformée par la représentation même de ce qu’il se croit devoir y trouver ; et il en est ainsi particulièrement quand ce témoin qui, spirituellement comme chez nous, n’a presque nul souci de la parole vraie, ni philosophie de l’honnêteté, ni principe de pureté quant à l’usage du langage et à son rapport au réel, en somme quand les mots qu’il emploie d’ordinaire sont généraux et flous, et avec quelles tristes mémoire et application ! La vérité à présent est seulement organique, en ce qu’elle s’est coagulée en la substance de ceux qu’elle a touchés aux entrailles et dans le sang, à tort ou à raison. C’est ainsi qu’on voit par exemple la Révolution française tolérer aujourd’hui cinq ou dix interprétations contradictoires selon la vision partisane de l’historien qui la décrit, la rendant inexploitable comme fait brut et débarrassé de suggestions (on lui fait dire à peu près ce qu’on veut, orientant ses origines et ses buts en maintes directions diamétralement opposées, toutes, pourtant et c’est le plus fascinant, extrêmement confondantes et documentées) ; c’est ainsi que l’on voit, et c’est plus grave et plus éloquent encore, que même le simple mouvement des Gilets Jaunes, qui n’est situé, au jour où j’écris, qu’un peu plus d’une année dans le passé, n’a pas rencontré d’interprète et de recensement majoritairement admis, y compris sous la forme d’assertions générales, au point que, encore et toujours, aucun chiffre, hormis des dates inutiles, n’est établi officiellement pour le mesurer, comme c’est traditionnellement le cas à chaque manifestation en France, preuve que le mensonge officiel de l’histoire se perpétue aussi bien au présent (et qu’on songe que c’est ce présent, où les documents sont censés être les plus « frais », qui servira de documentation à l’avenir !) ; et dira-t-on que la crise sanitaire que nous vivons en ce moment au milieu de tant de rapports, trouve et trouvera un jour le chemin des faits authentiques et objectifs (j’écris le 15 novembre 2020, et le documentaire Hold-up vient de paraître que députés et sénateurs décrient avant même de l’avoir vu en dépit donc de toute vérification, c’est donc qu’il n’y a, apparemment, même plus de faits au présent !?) ? Or, on peut logiquement croire qu’aussitôt que l’histoire bénéficie des apports infalsifiables et publics de la vidéo, il ne lui reste rien à exprimer, aucune matière malpropre à ronger et à régurgiter, à falsifier de sa bave colorée. Son rôle étant d’établir ou de confirmer des légendes, de peindre l’ancien sous des teintes fascinantes, de complaire non sans thèses à des autorités ou à des foules, sur quoi fondera-t-elle son intérêt quand l’interprétation seule, au siècle où nous vivons, ne produit à l’esprit nul sentiment d’éloquence ou d’imprégnation, nulle sensation de nécessité, nulle réponse à un besoin de vérité qui n’existe plus ? Quoi ? Est-ce que les Français interrogent la réalité du coronavirus et des mesures qui sont prises en ce moment même ? Non ! c’est trop compliqué, trop fastidieux, trop pénible, et ils n’ont pas l’ombre d’une méthode pour déceler ou vérifier la fiabilité d’une assertion ; c’est là ce que l’actualité prouve avec évidence, qu’ils n’ont pas même vraiment envie de savoir la vérité qu’ils estiment hors de portée, qu’ils ne se renseignent pas sur des faits qu’ils ignorent même où chercher, mais qu’ils ont seulement besoin de croire pour conformer leur esprit et attitude à des représentations collectives et persuasives, et persuasives justement en ce qu’elles sont notoires et répandues, même fausses (une croyance est excusable, pense-t-on, si elle est fort partagée : c’est, que par avance, faute d’efforts de vérité, on s’anticipe toujours de bons prétextes à avoir eu tort). Alors pourquoi se pencheraient-ils sur des réalités passées et d’autant éloignées qu’ils n’ont pas de criante nécessité plus que symbolique, c’est-à-dire puérile, à les connaître ; et pourquoi, dans le futur, se sentiraient-ils mieux concernés par des réalités d’aujourd’hui ? C’est donc bien ce que je dis, de la frime tout ça, de ce vernis culturel qui sert à se sentir rehaussé d’intelligence ; en somme, on lit de l’histoire non pour trouver la vérité mais pour se distraire ou se vanter ; or, dès que l’histoire ne tient plus ni des émois à exacerber ni des travestissements à exhumer, elle s’anéantit dans l’ennuyeux et l’inutile, plus personne ne la consulte, le décoratif même qu’elle exalte ridiculise alors son sens et lui retire tout sérieux : le livre d’histoire est devenu exactement le roman historique, s’il a jamais été beaucoup autre chose, le lecteur se moque de la différence, il y faut non tant du fait véridique que du pathétique incertain. Certes, tout ceci n’adviendrait pas sans doute, je veux dire cette poisse du pseudo-psychologique clinquant et de la couleur ostentatoire, si notre contemporain gardait davantage d’attachement pour la vérité que pour la tradition flatteuse des versions pittoresques et travesties qu’il exhausse du nom pompeux de « devoir de mémoire ». On parle de l’histoire, d’ailleurs : ce mot, à bien y songer, ne veut plus rien dire, il n’y a que des histoires, en ce que personne, même les spécialistes, ne tient beaucoup à s’investir, à se risquer, pour démasquer des mensonges ; il n’y a, comme le prétendaient des conseillers à la Maison Blanche, que des « faits alternatifs » – quel aveu d’une conscience décomplexée de ce qu’est profondément, essentiellement, l’histoire, c’est-à-dire une superficialité ! – : qu’est-ce que ça change, de nos jours, le mensonge appliqué à l’histoire ? Est-ce que nous vivons dans un siècle soucieux d’objectivité où le mensonge peut dévaloriser quelqu’un ? Qu’un livre mente ou dise le vrai, nul aujourd’hui ne s’en préoccupe, pas même les historiens qui, tout occupés à leurs travaux de pur « investissement » (qu’on entende ce qu’on veut derrière ce mot, il y figure bien une vérité, et même plusieurs !), n’ont guère le temps de se pencher sur des ouvrages ou de dénoncer des erreurs, et ils perçoivent même maints intérêts supérieurs à ne pas les critiquer au même titre exactement qu’on admet discourtois et périlleux, dans n’importe quel milieu professionnel, de dénigrer publiquement un confrère ; non, ce n’est que la forme du rapport qui subjugue le contemporain qui ne demande point à l’histoire de démontrer des réalités passées, il n’y connaît rien quand même l’historien, lui, y connaîtrait quelque chose (c’est ce qu’il présume pour se sentir rassuré de la compétence générale de la société où il vit, du « professionnalisme » fondé de préjugés favorables de tout ce qu’on lui communique, et ainsi de la confiance qu’il accorde au monde), il ignore même en quoi consisterait l’effort de prouver un fait, il ignore jusqu’à l’usage d’un langage d’exactitude au point que ce qu’il rapporte dans la conversation ordinaire est toujours consternant d’approximations, de faussetés et de proverbes ; non, tout ce qu’il veut de l’histoire, c’est seulement qu’elle présente l’apparence d’une vérité plaisante et valorisante à lire, ou mieux : à regarder. Pour les peuples de ce siècle, au-delà du symbole pitoyable auquel il tient, comme tous les peuples dégénérés, pour se gonfler « d’héritage » et de valeurs substituées aux siennes propres insaisissables, l’histoire n’est qu’un divertissement, au surplus il procure parfois de la grandeur factice, c’est pourquoi il n’existe pour eux aucune raison de ne pas continuer de jouer avec, si possible : c’est ce qui arrive quand la certitude personnelle, née de l’insouci et du confort par lesquels un moindre renseignement implique une rebutante peine, envahit le monde sur des indices infimes de vérité, et que toute opinion, perçue comme infiniment relative, n’intéresse personne (je demande absolument de vérifier cette dernière assertion en répondant à cette question : depuis quand avez-vous rendu un avis qui vous ait été préalablement et sincèrement demandé ? En somme, à quand remonte votre expérience d’une rencontre avec un être vraiment curieux d’une quelconque réalité ?). La vérité est une poursuite, une suite de contradictions qu’il faut en principe peser et assembler, sélectionner ardûment, pour démêler ce qu’on appelait autrefois l’histoire, et telles enquêtes, si soigneuses, ne sont pas de notre âge, je veux dire : pas de notre ère. Quand il y aura enfin de la vidéo partout, comme cela se multiplie au point qu’il y a de moins en moins d’événement qui ne soit filmé et même par plusieurs caméras à la fois, non seulement les gouvernements ne pourront plus fabriquer de l’histoire, ce qui signifie tout bonnement que les États et leurs chefs reprendront leur proportion humaine véritable et redeviendront les petitesses humaines que leurs légendes sur commande ont toujours dissimulées, mais il n’y aura plus de matière à historiens, parce qu’il suffira de projeter les films dont on disposera – mais c’est certes à condition qu’ils demeurent disponibles et que le contemporain reste disposé à les interpréter –, et toute voix explicative qu’on mettra sur ces images apparaîtra comme une façon de réalisation, de montage et de transitions assez superflus, un truc de fabricateur ostensible de fiction. C’est que l’historien, au fond et considéré sous cet angle, il est et a toujours été, à quelques exceptions près, le continuateur de légende, celui qui, dénichant des écrits qui corroborent un mensonge, proclame avec franchise (mais combien de naïveté !) : « Puisque cela se collationne, c’est donc probablement vrai », comme s’il n’existait pas de toute humanité des erreurs et des faussetés crues et consignées avec ferveur par cent ou un million de personnes à la fois ! L’historien – qu’on me pardonne l’offense ! – ne fait que déterrer depuis des siècles les fantômes, les auras, les imageries, que le peuple est désireux, incité et même auto-conditionné à croire pour toutes sortes de satisfactions, et que l’historien-même, en manière préalable d’hypothèse, intentionne toujours passionnément de révéler : ces historiens ne furent jamais des hommes de science mais des adeptes du bavardage et des explorateurs de la rumeur. Le fait même, la chose exacte du passé, l’action véritable et authentique des hommes, y compris précisément vérifié, n’a plus d’importance à moins d’être emballé et enrubanné au moyen d’une multitude d’impressions et de subjectivité où on le livre à la façon d’un cadeau plaisant, d’un présent, ni le sacre de l’empereur, ni le déroulement de la bataille, ni la décision politique de l’homme ; on en veut faire constamment des allégories révélatrices et suggestives, intention qui est toujours ce qui se perçoit en premier au philologue attentif, alors que les historiens qui les commentent sont incompétents à mesurer la plus petite cause qui détermine les hommes, leur grille de lecture étant souvent d’un symbolisme mièvre, déguisé sous le travestissement de la généralité quoique toujours partiale, tandis que le fait au-delà des interprétations n’intéresse personne, n’a pas le moindre intérêt pour le contemporain dont l’essence est entièrement départie de vérité, ne sert plutôt qu’à asseoir d’autres illusions, comme ces gens qui, une fois adultes et de plus en plus nombreux, recherchent désespérément des parents pour s’identifier et se fabriquer une identité factice – ainsi des aïeux du passé. S’il n’y a plus d’histoire, si l’histoire est une chose morte ou au mieux un amusement, c’est parce que notre époque ne laisse plus de mensonges à enjoliver, tout est devenu par trop terne et factuel, à découvert et extérieur, il y aura bientôt des yeux de machines partout pour rapporter la réalité plus éloquente par elle-même que l’esprit bas et décadent des historiens dont on a raison de se moquer des avis mondains ou presque amateurs et stupides ; l’histoire est finie, terminée, il n’y a plus d’histoire, il n’existe plus d’histoire contemporaine en tous cas à partir de notre temps, rien que de plates rétrospectives sous formes de comptes rendus arrangés en artificiels morceaux à suspense, on commence à s’apercevoir que les grands hommes du passé avaient exactement la hauteur de mythes – Clovis, Charlemagne, François Ier –, car ils étaient et sontdes mythes, rien davantage, car ce sont les historiens qui les ont bâtis de mensonges, ils n’ont jamais été réels à nos esprits, ils ne sont que propagandes, et l’on affirmera bientôt qu’il n’y a plus de grands hommes à démêler et à comprendre parce qu’un de Gaulle par exemple avait soigneusement arrangé sa légende, effort qui n’est plus aussi facile de nos jours, tout étant devenu tellement public et transparent, ainsi que Mitterrand qui était, comme chacun sait, d’une famille si unie et en si parfaite santé jusqu’au jour de sa mort : c’est uniquement ce genre de grandeur façonnée qui sert l’histoire, l’histoire n’est depuis longtemps qu’une complaisante édulcoration, et lorsque le déguisement devient impossible, quelle réalité secrète reste en apanage à l’historien-fossoyeur ? Tout est trop explicite, notre manque même de profondeur dénie la plausibilité d’un récit caché pour l’histoire, il n’y a plus rien chez nous à faire émerger, plus rien n’est assez dissimulé, c’est ainsi que l’histoire, qui ne fut presque jamais une science mais une façon d’accompagner la légende, s’éteint dans l’affadissement des distractions de foule et dans l’incompatibilité du présent devenu si clair et exposé : il y a une histoire de l’histoire, et l’on peut d’ores et déjà réaliser sa complète rétrospective. Cette rétrospective, en substance, est celle que racontent docilement et benoîtement les professeurs d’histoire en accompagnant et en transmettant la légende inculquée sans aucune volonté de recul, comme un pur catéchisme, mais il ne faut pas trop les blâmer car c’est aussi, cela, ce catéchisme, toute l’histoire ; le reste bientôt ne sera pas de l’histoire mais seulement des faits, quand sera enfin tout à fait achevée l’histoire d’une longue ère où, au-delà de l’indécelable incertain, le mensonge était possible qui lui servait non de réfutation ou d’adversité, mais bel et bien de fondation.

Publicité
Publicité
Commentaires
Newsletter
Publicité
Derniers commentaires
Publicité