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Henry War
15 février 2022

Le Jadot de service

La façon aventureuse éthiquement et électoralement avec laquelle M. Jadot ne s’est pas empêché de désigner M. Zemmour comme « Juif de service », révèle à mon sens deux vices intrinsèques et significatifs :

Le premier, c’est la décomplexion de nos politiciens aussitôt qu’il s’agit de lutter contre un « ennemi » qu’on estime « universel » : tous les coups sont permis, on ne se retient pas, on se défoule, on ose les calomnies, on frappe hors de la sphère de la légalité au prétexte intérieur que c’est « légitime » puisque l’adversaire est un « monstre ». Cette tendance à l’épanchement de la hargne n’indique pas qu’on mesure et assume les mots qu’on prononce, au contraire, elle signifie plutôt que M. Jadot n’est pas antisémite et qu’il a seulement injurié en considération d’un « statut », le statut qu’il se figure, en gros, que M. Zemmour est une sorte d’inqualifiable « méchant ». Une telle simplification est évidemment d’un manichéisme inepte, mais c’est le lot des orateurs qui, par exemple, font comme Mme Pécresse de leurs opposants politiques des incarnations d’épisodes de Star Wars : c’est insensé, mais ça porte dans certains esprits français habitués aux racolages et aux excès, à tous ces « bons mots » qui n’atteignent au fondement d’aucun sujet mais qui décrédibilisentet font superficiellement « spirituel » et « pointe ».

Le second vice, c’est le réflexe : a-t-on bien remarqué qu’on n’utilise plus l’expression « de service » depuis des décennies ? – où l’on sent que les discours de M. Jadot sont empreints de résurgences assez malheureuses et de conservatisme issus d’un temps où, en Boomer vérace et franchouille, on ne se retenait pas d’user de mots emplis de connotations sinistres mais qu’on se passe comme des proverbes ainsi mieux entendus. Il suffit de constater comme c’est tombé « comme ça », sans préparation, le « Juif de service » : manière de pensée révolue, obsolète, irréfléchie, ignoble et bête, où l’on ne s’interdit pas de catégoriser et d’exprimer en public un antisémitisme admis quoique passif, indolent et social, reliquat d’une époque de spontanéité du stupide, impropre à une politique de responsabilité et de considération soigneuse et appliquée. C’est comme cet homme que je connais, de la même génération, qui, quand il entend du R&B ou du rap à la radio, parle encore de « musique de zoulou », sans y penser particulièrement. « Juif de service » ou même « Arabe de service » est une expression, une locution assignatoire, qui ne devrait pas surgir spontanément dans l’esprit d’un homme digne et responsable. M. Jadot a tiré d’instinct un coup désastreux, et il révèle un mauvais instinct, l’instinct de qui fait de la politique avec instinct, justement. Il ne faut pas parler ainsi en politique, surtout pas : oui, mais il est vrai que, depuis des ans, même aux suprêmes pouvoirs, on se targue de pareilles invectives, sans retenue, sans finesse, dont on se soulage et qui semblent soulager les citoyens ; or, depuis qu’on déclare en président « avoir bien envie d’emmerder » une dizaine de millions de gens, on n’a pas trouvé que les Français aient fort désavoué leur président ; c’est peut-être une stratégie payante, après tout, pour autant que, quand on aspire à être élu, il suffise de se comporter avec l’inconséquence de ses électeurs c’est-à-dire en grossier personnage de Boomer sans scrupule ni éducation – en quoi de pareils témoignages de balourdise intellectuelle révèle bien ce que le peuple mérite, et il n’a alors pas lieu, comme je le fais, de s’en plaindre aucunement : il trouve cela plutôt drôle et « bien senti », ou plutôt il n’y pense même pas.

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