09 octobre 2022
Le film Camping et ma psychopathologie
Je m’étonne que le film Camping, que mes filles ont revu et que j’ai eu la complaisance de visionner avec elles jusqu’à un certain point, ne suscite pas parmi les spectateurs autant de révolte que mes articles de Pyschopathologie du Contemporain, étant pourtant foncièrement écrit avec la même volonté potentiellement humiliante de montrer au Français le très peu qu’il vaut, son dérisoire plutôt honteux et édifiant que drôle. Je ne puis en regarder les trois premiers quarts d’heure sans une profonde consternation : rien... [Lire la suite]
07 octobre 2022
Origine de toutes les peurs
Avoir peur – je l’ai finalement compris – c’est-à-dire avoir peur de mourir (toute autre peur peut se résoudre, se dissoudre, même en pensée, par la mort qui abrège : qui n’a pas peur de mourir n’a peur de rien, le couteau ou la balle étant propre à mettre un terme à n’importe quelle appréhension torturante) est toujours intrinsèquement lié à l’expectative d’un regret : ce qu’on redoute, c’est l’interruption d’un processus avant son terme. Il ne peut exister d’angoisse à l’idée seule de disparaître : le... [Lire la suite]
03 octobre 2022
L'Épée dans l'eau
J’aimais assez David L’Épée du temps qu’il avait conservé de sa noble curiosité : il eut même l’ouverture d’accepter un de mes écrits pour sa revue Krisis, moi le banni, le grincheux, le sans-sympathie qu’il connaissait à peine (bien que je crois qu’il s’en soit dédit peu ensuite à la façon dont il s’abstint de communiquer avec moi : c’est quelqu’un qui ne m’a jamais compris et qui s’est méfié peu à peu de mon étrangeté sans, je dirais, pouvoir jamais me reprocher une indélicatesse). C’était l’être cosmopolite, dynamique,... [Lire la suite]
03 octobre 2022
Des témoins sans interprètes
Jamais un homme ne révèle une vérité essentielle sur son siècle, espace ou temps : il se contente de passer des représentations du monde, de les véhiculer et de les transmettre ; tout au plus peut-on lui réclamer des faits à titre de témoin, sous réserve qu’on prenne garde de ne pas influencer ses réponses, notamment de ne jamais induire de valeurs, ou il serait capable d’altérer et travestir la réalité à son avantage et sans y penser pour correspondre à telle image qu’il faut. J’ai songé tout à l’heure, et c’est très... [Lire la suite]
01 octobre 2022
Faiblesse du suffrage démocratique
Un peuple démocratique, à force d’être entretenu dans la forme spécifique de stupidité que promeut l’irresponsable confort – passivité et bêtise –, devient incapable de bien voter, et généralement en toutes choses il délibère mal, ce que Tocqueville implacablement formulait de la façon suivante : « Il est, en effet, difficile de concevoir comment des hommes qui ont entièrement renoncé à l’habitude de se diriger par eux-mêmes pourraient réussir à bien choisir ceux qui doivent les conduire ; et l’on ne fera point croire... [Lire la suite]
29 septembre 2022
Le Contemporain est un Münchhausen
L’un des grands malheurs du Contemporain, c’est de n’avoir pas de malheur si authentique qu’il puisse se donner, avec cela, l’illusion de sa grandeur par l’impression d’une épreuve. Il se sait vivre dans un confort qu’il n’a pas mérité, toute comparaison historique ou géographique lui fait honte de porter une moindre plainte, et il tire de ce constat indéniable une révélation de petitesse et une forme de culpabilité qui l’incitent à se fabriquer des malheurs de substitution, des pseudo-malheurs, des malheurs de pacotille. C’est à... [Lire la suite]
26 septembre 2022
Péril des peuples du confort
Lorsqu’un peuple sombre par degrés dans l’abrutissement et la facilité nés du confort, le plus grand péril qu’il encourt du fait de cette décadence vient de son propre gouvernement.
Il est pourtant vrai en démocratie que les hommes d’État tirent leur responsabilité des électeurs c’est-à-dire d’une portion large des citoyens, et également qu’ils sont eux-mêmes extraits d’une foule et constituent des pièces de troupeau rendues stupides par des années d’insouciance, en sorte qu’on pourrait présumer qu’ils ne feront rien que ce qui émane... [Lire la suite]
21 septembre 2022
Les vraies couleurs de l'enfant
Nous ne savons rien de l’intellection des enfants, de leur appréhension du monde, de la mentalité modale, primordiale, paradigmatique, avec laquelle ils sélectionnent les informations nouvelles de leur environnement, les intériorisent, s’en stimulent, et les intègrent à leur presque-rien-su, à leur omniprésente incertitude, à leur mystère et leur incompréhensible, à leur néant de l’Inconçu où ne saurait graviter déjà des « données » ; nous n’en savons rien, et sommes loin d’avoir la sagacité de le comprendre, et même... [Lire la suite]
20 septembre 2022
Les nouveaux dandys superficiels
On rencontre sur maints réseaux sociaux des délicatesses aux airs supérieurs de dandys, aux pseudonymes distingués ou savants (avec ou sans particule), aux fragrances plus ou moins crânes de muscadins, et qui font, par l’immédiateté de leurs réflexions, l’excellente impression de figurer des gens à qui parler c’est-à-dire enfin de qui apprendre. Ils citent volontiers des excellences aujourd’hui méconnues, goûtent quolibets grandiloquents et connivences sophistiquées, relaient des informations décalées sur de la... [Lire la suite]
17 septembre 2022
Pourquoi il n'y a plus débat ni sagesse
Dans notre société, la contradiction s’est fâcheusement changée en contrariété. Tout le monde est devenu très attentif à ses irritations, complice de ses affectionnées humeurs, meilleur ami de son épiderme, et compatit extrêmement à ses propres penchants, ne les retient point, les chérit comme la part spontanée de lui-même, son « véritable soi » qu’il considère « profond » parce que ça « jaillit » et qu’il est incapable de se contenir : il faut bien que ce soit bon puisqu’on ne peut l’empêcher, ce... [Lire la suite]