07 septembre 2020
Je me crains quand j'écris
Celui qui ne dispose d’aucune notion fondamentale en littérature ou en art est incapable de se figurer l’extrême angoisse de l’artiste qui écrit : l’écrivain, pour lui, s’amuse ; il ne fait que recopier des images ; il transpose sur le papier ses imaginations fantasques ; ce lui est même agréable, comme il dispose d’une maîtrise pour cela, de matérialiser ses visions ; on l’envie de ce savoir-faire, de cette chance ; ce n’est rien qu’un jeu qu’un expert domine et toute la difficulté pour y réussir... [Lire la suite]
24 août 2020
Ecrire un poème
Comment peut-on être homme, comment peut-on avoir conscience de son individualité sans jamais écrire, sans jamais se sonder, sans jamais se mesurer soi-même ? C’est ce que je ne parviens plus à comprendre, ce qui me semble à présent impossible, à quoi je n’accorderai plus jamais mon déjà si lointain « bénéfice du doute ». Ai-je donc si peu vécu pour en venir déjà à supposer qu’il n’y a que des ombres qui se penchent sur mon feu ? Oui, je le confesse – c’est cependant une confession qui n’absout personne – : la... [Lire la suite]
09 juin 2020
Ecrire est devenir
Je n’entends plus ce que « changer », « évoluer » ou même « devenir « peut signifier sans la pratique de l’écriture. J’essaie de l’imaginer, mais je ne parviens décidément à rien de probant : vous seriez donc là à réfléchir seul, à vous « creuser les méninges » dans une espèce de vide loin de tout support, et avant que d’avoir conçu la moindre nouveauté par vous-même il vous faudrait vous y cantonner faute de savoir en retenir plusieurs à la fois et par paresse de la fixer quelque... [Lire la suite]
19 mai 2020
Deux nouvelles publications : "La Délivrance de Malpenser" et "Du Feu aux poudres"
Je me rappelle, après que les éditeurs non seulement n’ont pas accepté mon ambitieux Norsmith sur lequel j’avais fondé maintes espérances et trois années de travail, mais ne l’ont tout simplement pas lu, avoir éprouvé une véritable déception, et même, je dois dire, une sorte d’amertume estomaquée, de dégoût incrédule, de profond désabus, qui devait marquer le début d’une conscience éclairée sur les causes de déchéance de notre littérature contemporaine et sur le monde tel qu’il est devenu c’est-à-dire empli d’incompétence nuisible et... [Lire la suite]
15 mars 2020
Littérature fin-de-siècle et fin de littérature
Tout effort progressif atteint tôt ou tard à quelque comble qu’il paraît individuellement impossible de surpasser. C’est le propre d’une évolution graduelle de donner lieu à désespérer à l’admirateur, en toute matière exactement où la qualité s’estime selon des critères objectifs : une exaspération et presque un écœurement étreint alors l’épigone qui, redoutant d’en rester à l’émule, se sent d’avance regretter de demeurer toujours disciple et imitateur. Tâcher de faire mieux alors, c’est apparemment viser l’inaccessible : un... [Lire la suite]
26 février 2020
Un bon écrivain est un écrivain mort
Notre époque et notre société devenues tant démocratiques et égalitaires ne peuvent plus supporter la reconnaissance du génie spontané, individuel et éclatant : un tel génie si marginal ne peut que leur paraître élitiste et suspect, radical et antisocial, une insulte et un outrage au progrès omniphilanthropique des siècles. Un embarras les saisit d’abord, une tension les étreint aussitôt qui confine presque à l’oppression et au mal, il faut qu’elles adjoignent immédiatement à cette nette intuition de valeur un sentiment louche,... [Lire la suite]
17 février 2020
La littérature comme physique et comme mathématiques
La mesure de toute idée, de tout raisonnement comme de toute représentation éloquente, c’est l’homme, c’est l’esprit humain, c’est la faculté de l’esprit humain. Plus exactement, cette mesure doit toujours consister, pour le penseur au grand Recul, comme un phare surplombant tout jugement d’un dit ou d’un écrit, en la pensée humaine arrivée à quelque degré de perfection, à quelque haut période, à quelque apogée. Mais il n’existe pas de vérité relative, ça non, ceci est un mensonge atroce et délétère, contaminant toute volonté... [Lire la suite]
24 janvier 2020
Pause de la fiction
Il y a longtemps déjà que je n’écris plus de fiction, bien que j’écrive tout le temps que la vie m’en laisse des articles sur la littérature et sur la réalité du monde contemporain. Le roman vaut pourtant quelque chose, et j’ai toujours de côté mon ArkOne inachevé que je reprendrai tôt ou tard, mais mon souhait premier, que j’éprouve impératif et urgent, d’étendre ma compréhension de notre société et de clarifier mes pensées me détourne de l’art imaginaire. Je devine pourtant combien j’ai tort, ou plus exactement combien j’aurais tort... [Lire la suite]
31 décembre 2019
Nouvelle publication : "Pourquoi vous lisez de si mauvais livres"
J’imprime de nouveau à mon compte. Fort de mon talent confirmé à dénicher, à force d’acharnement, de belles illustrations appropriées, c’est John Frederick Peto qui fournit cette fois ma couverture, peintre américain comme son nom ne l’indique pas du tout, et dont je ne connais rien sinon que son Tresor rebut de 1904 sert admirablement mon projet : rendre visuellement compte de livres déclassés, d’une pile de bouquins sans valeur, d’un tas de papiers délaissés qui jaunit négligemment et sans aucun avantage.
Cet essai résume... [Lire la suite]
28 décembre 2019
Discussion sur Discussions
J’imagine de moins en moins comment on peut vraiment penser sans écrire.
L’inconvénient avec l’oral, c’est qu’à moins de disposer d’une mémoire prodigieuse – ce qu’on ne peut réellement pas attribuer en général à nos contemporains –, tout y est évanescent et provisoire, tout s’échappe et tout fuit : on ne se souvient que d’une fraction très réduite de ce qui s’est dit, concentré surtout à réfléchir et à répondre avec pertinence, à « donner le change », d’une façon ou d’une autre. Ou bien, quand on a entendu quelque... [Lire la suite]