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Henry War
2 mars 2022

Les avions-papier de l'Union Européenne

J’ignore comment on a osé avancer l’ultime puérilité périlleuse de la livraison d’avions de combat à l’Ukraine, ni qui est à l’origine de cette idée ridicule et funeste, mais c’est de toute évidence l’aventure la plus stupide et la plus inopérante qui ait jamais été prononcée s’agissant de résoudre ce conflit.

Le problème de l’Europe, le problème de l’Europe parce qu’elle est constituée de gens qui s’opposent en postures, en intentions et en principes au nom d’une unanimité au lieu d’être pragmatiques et concrets, c’est que ses dirigeants trop nombreux sont incapables de concevoir les conséquences pratiques de ce qu’ils proposent. Ces gens se sont interrogés trop tard sur les effets et les moyens d’une telle livraison dont ils n’ont nulle idée pour l’heure ; de fait, ils n’y ont pas réfléchi, parce qu’ils estiment que le fondement de leur réflexion doit consister en des valeurs affichées, en des placards manichéens, en des pétitions de bravoure et des déclarations de solidarité inepte. Ces gens sont des amateurs : Mme Van der Leyen ne connaît rien en guerre pas plus qu’elle ne connaissait quoi que ce soit en matière de vaccins.

Et les voilà donc qui veulent livrer des avions : soit ! où donc les livreront-ils (question nécessaire et pratique) ? Ils se sont aperçus tout à coup, après leurs proclamations, de la façon dont se déplace un avion, et ils se sont tournés vers leurs amis fabricants d’armes qui, contents de réaliser des ventes, leur ont quand même répondu, un peu tard : « Un avion, cela se livre en se déplaçant par voie aérienne dans une base militaire d’accueil ». Nos chefs d’État n’avaient pas du tout prévu qu’on ne fait pas, en général, rouler des avions à travers l’Europe, ni dans des camions, ni dans des trains.

Or, quel problème cela pose-t-il, à une heure déjà avancée où l’on avait espéré que le problème majeur ne résidait plus que dans le choix d’avions aux commandes connues par des pilotes ukrainiens ?

Eh bien ! le problème est qu’on ne peut pas, depuis l’extérieur de l’Ukraine, entrer dans l’espace aérien ukrainien avec des avions de chasse pilotés par des Européens livreurs sans, en pratique, déclarer la guerre à la Russie : c’est la Russie qui contrôle désormais cet espace. On a envisagé de prêter ces avions à des pilotes ukrainiens qui les décolleraient depuis des bases occidentales : cela revient une nouvelle fois très concrètement, pour le pays de départ, à déclarer la guerre à la Russie, et, depuis hier au moins, la Pologne a compris cela, c’est pourquoi son président a reconnu que son pays « ne livrera pas d’avion dans l’espace aérien ukrainien » car « nous ne prenons pas part à ce conflit, l’OTAN ne prend pas part à ce conflit » (je m’aperçois aujourd’hui que cette déclaration, retransmise hier 1ermars au journal télévisé de France 2 et encore diffusée en Replay, n’est pas facilement accessible sur Internet).

Ce n’est pas tout : un Ukrainien qui décollerait de Pologne pour rejoindre son pays, à l’heure actuelle, ne rencontrerait manifestement aucune base pour se poser : la Russie semble être parvenue à incapaciter toutes les installations militaires destinées à l’aviation ukrainienne, de sorte que si l’Ukraine ne réclame absolument pas ces avions, c’est parce que de toute façon elle ne dispose plus d’aucune place pour les faire atterrir ou partir.

Ce n’est pas encore tout : admettons même qu’il demeure une base où, après un si grand danger diplomatique pour l’Europe, un Ukrainien puisse, inaperçu, fixer son avion de chasse. Admettons même que l’Europe parvienne à livrer cinq ou même douze avions qui constitueront ainsi l’intégralité de la flotte aérienne ukrainienne : c’est cent ou deux cents avions russes qui, en moins d’une demi-journée, fondront sur ces engins équivalents aux leurs : a-t-on jamais vu que dans une guerre aérienne un rapport numérique de dix contre un ait fait pencher la bataille en faveur du plus petit nombre ? Je ne souhaite pas, pour les pilotes ukrainiens, qu’on leur livre des avions : ce serait pour eux un massacre annoncé.

Il faut enfin en convenir : cette idée est si bête, paraît si faite pour le suicide, et comporte tant de menaces d’escalade, qu’on ne peut aisément supposer qu’elle a été dictée par quelque Européen intelligent, et j’ose dire : par un Européen tout court. La façon dont cette idée suggère une volonté d’aggravation et de généralisation de la guerre, volonté dont la réalisation s’avère, comme on l’a vu, totalement inutile, induit l’intention d’une puissance qui ne court aucun péril immédiat en Europe à proposer des idioties, et qui peut aussi souhaiter, pour son hégémonie future, que l’Europe se mette à feu et à sang. Quant à désigner cette puissance, moi qui n’en suis qu’aux hypothèses, je ne m’y risquerais pas, mais on devine sans peine, je suppose, de qui il peut s’agir en se tournant vers ceux qui, depuis des décennies, placent stratégiquement leurs influences et leurs pions insolemment de tous les côtés du monde. 

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