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Henry War
15 août 2022

Prétexte à ne pas faire d'enfants

D’aucuns prétendent que c’est parce qu’ils craignent pour l’avenir de la planète qu’ils refusent de faire des enfants : ce serait ainsi par générosité qu’ils renonceraient à perpétuer des êtres qui ne profiteraient pas d’un maximum de confort. Or, comment un argument si dérisoire et abstrait pourrait-il résister à l’appel vital de la paternité ? Les a-t-on déjà vus en quoi que ce soit se priver de leurs envies ? Non pas : ils se consolent de leur égoïsme réprouvé, la société considérant encore comme paresse leur absence d’initiative et d’action, en le convertissant en illusion de sacrifice, d’altruisme vanté ; ils n’étaient que rétifs et pessimistes, les voilà devenus responsables. En vérité – je ne saurais tout à fait les démentir –, c’est surtout qu’ils veulent jouir longtemps de leur liberté, de leur insouciance, de cet état d’enfance qui les caractérise tant et qui, chez eux, semble pouvoir durer toute la vie, candeur puérile, abandonnée, ingénue et facile, où les pousse la satisfaction perpétuelle et assez immédiate de leurs caprices. Or, cette candeur serait, avec même une courte progéniture, entravée par un statut, par une posture parentale, par un effet d’éducateur, qui leur ferait une révolution et qu’ils refusent par principe d’entreprendre. Ce n’est pas au juste qu’ils redoutent le manque pour leurs fils qui, ils le savent, s’adapteraient toujours évidemment aux conditions de leur naissance, mais ils angoissent extrêmement à l’idée de la perte du fils qui est en eux, cette mignonne et frêle créature de lubies qu’il faudrait dépasser pour se placer au-dessus du rôle dont ils ont trop pris l’habitude, de, justement, consommateurs de ressources. D’une certaine façon, ils ne font que s’accaparer ce qu’ils estiment les ultimes reliquats terrestres à leur fin exclusive, en refusant à d’autres, considérés en parasites, de se les approprier avec eux : ce n’est pas foncièrement qu’ils s’inquiètent de ce dont d’autres seraient dépourvus – car il ne leur suffirait alors que de s’efforcer maintenant pour y remédier –, c’est essentiellement, les actes politiques les épuisant d’avance et leur paraissant si « sérieusement adultes », qu’ils ne veulent tout simplement pas partager.

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Commentaires
C
Le propos est aussi juste que dérangeant, porté par un style classique et revigorant dont vous êtes l'un des derniers ambassadeurs. En quelques lignes vous avez campé, avec plus de brio et d'efficacité, un enjeu que les sociologues et autres experts déclarés du childfree movement, décortiquent sans parvenir à en percer les ressorts profonds. L'enfance libertaire comme valeur suprême et triomphante est en effet un motif à étudier, hélas délaissé par les analyses habituelles férues de causes lisses et consensuelles qui entravent l'accès à la vérité.
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A
Les barbares ressourceront la jeunesse (genèse ?) du monde avec la vitalité qui les propulse. Par une autre forme d'ivresse les tendres petits flocons se fondront dans les plumes de leurs taies, que l'on ne les entendent plus jamais, ce rêve évanoui de leur délicatesse.
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