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Henry War
28 juin 2022

Deux conseils pratiques pour écrire sans fatigue

Il n’y a que la fatigue pour vraiment empêcher d’être en disposition d’écrire : toute autre condition ne s’y oppose point, et l’on peut autant écrire dans la douleur, dans l’épreuve, après un effort, en manquant de temps, parmi une foule, en déplacement, avec l’envie d’uriner ou le désir de rapports sexuels, sans rien perdre de la qualité de son écriture (on écrira peut-être moins ou davantage, voilà tout).

Mais la pensée confuse, les idées peu claires, l’impression mentale d’une lenteur, qui, seules, défigurent indiscutablement l’écrit, proviennent presque toujours d’un facteur unique :

La fatigue.

Il ne faut pas écrire quand on est fatigué, par crainte d’affaiblir sa pénétration – et, en général, il faudrait s’abstenir de réaliser quoi que ce soit dans la fatigue, ou, du moins, surveiller avec une austère vigilance ce qu’on fait alors, quitte à perdre énormément de temps en le faisant, à dessein d’être sûr de l’avoir fait avec excellence.

Il faut donc premièrement reconnaître les signes de la fatigue, se savoir et écouter. C’est très concret. Celui qui ne distingue pas les indices de sa propre perte d’efficacité intellectuelle ne devrait jamais se risquer à tenter une œuvre. Il ne sait pas assez ce qui nuit à son travail. Il s’apprête à réaliser quantité de médiocrités sans le pressentir. Là-dessus, je n’en dirai pas plus : je n’écris tout de même pas un article de développement personnel.

Or, quand on reconnaît sa fatigue, il n’existe que deux moyens d’y obvier : le sommeil et la nourriture.

Une sieste de vingt minutes environ répare avec netteté les symptômes de la lourdeur engendrés par la fatigue, symptômes manifestes en lenteurs dans l’enchaînement des idées ou en pertes de mémoire. Il doit s’agir d’une vraie sieste où l’on dort, où le cerveau effectue des « sauts » brefs dans le domaine du rêve. Si, en écrivant, les paupières s’abaissent et l’attention se disperse dans des pensées adventices, si la respiration s’allonge et le cœur croule, allez dormir immédiatement : vous ne ferez rien de bon de toute façon, et il vous faudra retoucher plus tard tout ce que vous écrirez dans cet état faute d’avoir pris l’initiative de vous recoucher. Or, il est souvent plus délicat de reprendre un texte mal écrit plutôt que d’en écrire un satisfaisant du premier coup.

Il ne faut pas non plus négliger que le corps a régulièrement besoin de se sustenter pour maintenir ses fonctions physiologiques, cerveau compris : par exemple après un petit-déjeuner à sept heures, l’organisme ne saurait bien « tenir » jusqu’à midi sans quelque apport alimentaire. Vers le milieu de cette période, sans avoir besoin de dormir, vous ressentez une faiblesse, votre esprit s’affaisse et peine sans explication, insuffisance qui ne se déclare même pas toujours par une sensation de faim : probablement, votre corps réclame des calories. Allez manger un peu. Moins de dix minutes après, vous serez étrangement dispos pour reprendre l’écrit : la sensation d’épuisement mentale sera certainement passée.

Je ne néglige jamais, comme on le voit, les considérations d’ordre physiologique dans l’accomplissement d’un travail : c’est une pure question de logique pragmatique, au même titre qu’un enseignant devrait étirer un peu sa mâchoire et boire régulièrement pour s’exprimer avec clarté et fluidité. Il y a aussi les questions de posture de travail dont je crois avoir déjà parlé, et encore plusieurs règles liées aux dispositions corporelles dans le processus d’écriture, y compris les questions de température et de luminosité ambiantes. Il n’est pas indispensable d’écrire dans un décor parfait mais s’il s’agit d’écrire longtemps, il est nécessaire que ces circonstances ne soient pas inconfortables, car la moindre gêne, passé un certain temps, se change bientôt en douleur, puis en torture. Il m’a semblé utile de revenir sur la fatigue qu’on néglige le plus, de façon notamment à pouvoir faire admettre qu’il n’existe aucune autre excuse de nature à différer le moment d’écrire, excuse qu’on tient alors plutôt de la paresse que d’une véritable difficulté.

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