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Henry War
19 février 2023

Si M. Palmade était crevé

Il serait d’une ironie triste et en quelque sorte réjouissante, quoique contrariante pour beaucoup, qu’on découvrît tout à coup que l’accident de M. Palmade, dont tout le monde parle et qui outrage tant de belles et fortes consciences, ne fût dû qu’à un pneu crevé, et que le garage qui l’a monté ou la marque qui l’a fabriqué en fût l’unique responsable, tandis que le conducteur, même reconnu drogué, était en assez bonne possession de ses moyens et n’avait guère de raison de s’abstenir de prendre le volant. Ce serait un démenti fâcheux pour tant de bonnes gens courroucés qui font de ce fait divers, dont il existe une variété impressionnante chaque jour, une affaire puérilement symbolique et prioritaire au prétexte que la notoriété de son principal acteur mériterait qu’on s’en prît avec déchaînement à tous ceux qui réussissent dans la vie tout en commettant quelquefois des erreurs ou des fautes. N’y a-t-il pas dans les journaux bien assez de quoi se scandaliser des méfaits de la drogue ou des turpitudes de la richesse sans aller jeter son dévolu hargneux sur cette histoire-ci parce qu’une occasion de tabloïd, où la vilaine curiosité populaire se complaît tant à déverser les frustrations de son fiel, offre à rendre public un accident qui n’a même rien de particulièrement exemplaire ? Et c’est tout naturellement que ces gens prétendent parler de la réalité, de la « vraie réalité des gens simples comme nous » : or, s’ils avaient suivi juste une semaine le travail d’une compagnie de pompiers, ils auraient vu que cette réalité qui, en vérité, les éblouit par contraste avec leur quotidien tandis qu’ils feignent d’y être accoutumés, est d’une banalité misérable dont ils ne s’offusqueraient pas comme ils font. Pire : ils ont tous parmi leurs connaissances de bons amis qui boivent un peu et conduisent sans souci, et ils répondent au téléphone au volant, ou ils respectent mal les limitations de vitesse, et les voilà ulcérés parce que ce drame est le prétexte à se donner de la colère bienfaisante et une vertu toute en verbe qui ravivent leur médiocrité. Ne gagnent-ils pas en effet un « héroïsme » à se soulever contre l’injustice, eux qui ont consenti sans la moindre difficulté à priver des personnes de l’accès à certains lieux et à certains métiers comme des Juifs historiques ? Quelle bravoure : « Palmade-peine-de-mort-tout-de-suite ! Oui, et contre la réforme des retraites, pas plus de deux jours de grève dans le mois, c’est suffisant ou bien c’est trop d’argent ! »

Alors d’accord, admettons, un « crime », une « horreur », même L’« atrocité » si l’on veut, et aussi, je sais bien, la famille-endeuillée-et-si-c’était-vous-c’est-facile-la-distance-à-ce-compte-là – bon. Mais si c’était un pneu, rien que le fichu stupide pneu ordinaire qui a éclaté ? La drôlerie alors de leur déconfiture, malgré tout ! Oh ! je ne me fais pourtant pas d’illusion, ils ne s’amenderaient pas pour autant : ils n’auraient bien sûr qu’à se rabattre sur l’odieuse infraction de ces pneus que des garagistes-escrocs-assassins montent délibérément mal ou des profits scandaleux que leurs fabricants-monstres-de-capitalisme-forcené réalisent en les vendant

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