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Henry War
18 août 2022

Paralysie de nos "lettres"

La « rentrée littéraire », cette imbécillité unique en Europe qui fait paraître environ la moitié de la production française de fiction dans un contexte d’atroce concurrence interne parce que c’est nécessaire pour postuler au Congourre, vérifiera une fois de plus la stagnation affreuse de nos « lettres » imposée par l’Édition, dans l’indifférence générale puisque plus personne ne se soucie de littérature d’autre manière que comme marchandise pour faire de l’argent. On trouvera que nos célébrités se sont figées dans des thèmes et un style que l’exercice logiquement aurait dû faire évoluer, on le trouvera cependant on ne s’en plaindra pas, parce que cela rassure : c’est comme à une réunion d’anciens diplômés s’apercevoir que ses ex-amis sont toujours idiots et prévisibles, ça suppose qu’on n’a guère déchu soi-même, et puis on les aimait bien pour ça, justement. À dessein de ne pas déstabiliser le lectorat abruti de « recettes », les éditeurs auront réclamé une immobilité artistique, et il semblera après parutions que nul n’y pouvait rien, que c’est la production intellectuelle qui est actuellement comme cela. Ainsi, Despentes qui déclarait en 98 : « Si toute ma vie je suis là-dedans, je pense que ce sera un peu problématique », se dédiera encore de sa bonne volonté de changer, Nothomb conservera la manie de publier une nouvelle indigente au prix d’un roman capital dont elle pérorera ensuite sur tous les médias complaisants, et d’autres Gaudé, Rufin, Lévy… tant de dizaines… poursuivront des séries alimentaires qui n’auraient jamais dû être commencées et qui ne valent pas un « roman de gare » d’il y a cent ans. On finira encore, parmi des critiques aussi analphabètes que systématiquement louangeurs sauf à ceux qui les insultent, par vanter, aux concours que les vrais écrivains jugent des lauriers à racoleurs, des « représentants de notre époque », gens placés par cooptation, nuls, ennuyeux, vendus, policés, dont la prétendue subversion est évidemment une variété contrôlée de convenance, et tout roulera fluidement au caniveau comme coutume, le Français « avalera » sans discontinuer, affirmatif et péremptoire sur la vertu de lire même de la nourriture stercoraire, comme si la scatophagie constituait une variété valorisante de gastronomie.

Je sais bien qu’on s’en fiche, mais ne songeriez-vous pas un peu, un jour, pour une fois, à cesser de vous alimenter chez les GaFlam du livre, ne serait-ce que pour voir ? Ce n’est pas que je souhaite vous empêcher de vous nourrir de temps en temps au Mc Donald, on peut bien se « laisser aller » quelquefois, mais c’est devenu, de l’aveu du Syndicat National de l’Édition, seulement cinq livres en moyenne par Français et par an, dont environ 80% de best-sellers : autrement dit, c’est bel et bien « malbouffe » en France tous les jours et sans discontinuer. Mais on « lit », il paraît – les Français sont fiers –, on ne voit pas ce qu’on leur reprocherait puisqu’ils « lisent ». À telle fréquence, si modique, minable, j’en profiterais à leur place pour acheter plus raffiné : ils vont seulement cinq fois par an au restaurant et se jettent toujours sur l’excrément le plus prochain ! Économisez au lieu de ça, faites plus utile et moral comme… investir dans le gaz russe ! Et à l’occasion, « partagez », comme on dit : quand il existe encore de bonnes tables qui ne manquent pas de place, c’est presque un délit de ne pas les promouvoir – si on ne mange pas aux bonnes enseignes, un jour il n’y en aura plus. Par exemple, si War vous ennuie de ces leçons intempestives, allez toujours voir Juan Asensio : c’est un critique qui a certaines manies lui aussi mais qui vous fera des indications telles que vous aurez, certainement, l’impression de n’avoir pas lu un commentaire littéraire – et peut-être même un texte – avant lui.

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Commentaires
A
Après "Les Belles Lettres" les "Moches Pâtés" ? En paysan je sortis du village en véhicule avec mon fils et son amie et nous allâmes à l'enseigne culturelle (ça renarde comme un fennec voluptueux) de la petite ville voisine. Ma fascination fut celle de découvrir que je vis donc dans une république démocratique impopulaire où règnent des prose dignes (plutôt indignes, c'est le gap) des propagandes permanentes, assénées éhontées et auxquelles on ne peut que difficilement échapper, les titres universitaires ne confortant pas la doxa ne sont pas très aisément disponibles, c'est malencontreux. Néanmoins les 500 à 800 titres de chaque rentrée sont pour leur grande part bien bonnes balises, mais en cherchant il est possible d'échapper à la chère connerie et ses mauvaises pentes vieillissantes, ma roquette usée en témoigne. Je situe plus aisément mes désirs avec un certain recul temporel. Et je conclue tout de même, un autre jour à puiser pour m'étancher cette patience et sa taquine curiosité de mutin.
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